Swiss legislators have recognized the Armenian Genocide in 1995. If you know of other documents to be added to this list – old or new – please send a note to elizabeth@anca.org. We look forward to showcasing them.
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Switzerland National Council
December 16, 2003
The National Council recognizes the Genocide of the Armenians in 1915. It requests from the Federal Council to register it and transmit its position through the usual diplomatic channels.
Explanation
The extermination of the Armenians of the Ottoman Empire during the First World War has annihilated more than a million people who were deported and massacred at the order of the Ottoman rulers. These facts, incontestable in their significance and magnitude, have served as a reference for Raphael Lemkin, the lawyer who coined the notion of genocide. The norms established by the United Nations in the 1948 Convention correspond precisely to the process of destruction endured by the Armenians.
By the recognition of the genocide of the Armenians, Switzerland will do justice to the victims, the survivors as well as their descendants, and will contribute to the prevention of other crime against humanity. This is a decisive gesture by which Switzerland will show its commitment to human rights, respect for minorities, and international criminal law. In addition, it evokes the imprescriptible nature of crimes against humanity, and thus contributing to the struggle against negationism.
The Armenian Genocide has been recognized by the United Nations in 1985 through the adoption of the report of one of its expert committees, the Sub Commission for the Prevention of Discrimination and Protection of Minorities, and then by the European Parliament in a resolution in 1987. In the last few years, the parliaments of France, Sweden and Italy have done the same, as well as numerous parliaments in Europe and elsewhere. The Canton of Geneva has done it twice: through the Grand Council in 1998 and through the State Council, last December. Finally, we can mention the position of the World Council of Churches through the adoption of a declaration in 1983.
On March 13, 2001, the National Council, after a unanimous decision of the Commissions of Foreign Policy of the two Chambers, transmitted to the Federal Council the petition of the Association of the Opponents to Genocide (Frankfurt-am-Main) “so that they register it” and invited them to “address the question of the Armenian Genocide in the context of the political dialogue between Switzerland and Turkey”. It is therefore natural for the National Council to ratify this position through a solemn declaration.
The National Council wishes through the adoption of this Postulate to contribute to the establishment of a lasting peace between Turks and Armenians, a peace that can only by established by a common vision, and which conforms to the historical truth.
Switzerland (Helvetic Confederation) National Council Resolution
December 16, 2003
02.3069 – Postulat.
Reconnaissance du génocide des Arméniens de 1915
Déposé par: Vaudroz Jean-Claude
Repris par: de Buman Dominique
Date de dépôt: 18-03-2002
Déposé au: Conseil national
Etat actuel: Liquidé
Texte déposé
Le Conseil national reconnaît le génocide des Arméniens de 1915. Il demande au Conseil fédéral d’en prendre acte et de transmettre sa position par les voies diplomatiques usuelles.
Développement
1. L’extermination des Arméniens de l’Empire Ottoman pendant la Première Guerre mondiale a anéanti plus d’un million de personnes déportées et massacrées sur l’ordre du pouvoir ottoman. Ces faits, incontestables dans leur signification et leur ampleur, ont servi de référence à Raphael Lemkin, le juriste qui a défini la notion de génocide. Les normes fixées par l’ONU dans la Convention de 1948 correspondent très exactement au processus de destruction subi par les Arméniens.
2. Par la reconnaissance du génocide des Arméniens, la Suisse rendra justice aux victimes, aux rescapés et à leurs descendants et contribuera à la prévention d’autres crimes contre l’humanité. C’est un geste décisif par lequel la Suisse montrera son engagement pour les droits de l’homme, le respect des minorités et la justice pénale internationale. Elle rappelle en outre le caractère imprescriptible des crimes contre l’humanité et entend contribuer à la lutte contre le négationnisme.
3. Le génocide des Arméniens a été reconnu par l’ONU en 1985 à travers l’adoption du rapport d’une de ses commissions d’experts, la sous-commission pour la prévention des discriminations et pour la protection des minorités, puis par le Parlement européen dans une résolution en 1987. Au cours de ces dernières années, les parlements français, suédois et italien ont fait de même, ainsi que de nombreux parlements en Europe et ailleurs. Le canton de Genève l’a fait à deux reprises: par le Grand Conseil en 1998 et par le Conseil d’Etat en décembre dernier. On peut citer enfin les prises de position du Conseil oecuménique des Eglises, à travers la Déclaration adoptée en 1983.
4. Le 13 mars 2001, le Conseil national, après décision unanime des Commissions de politique extérieure des deux Chambres, a transmis au Conseil fédéral la pétition de l’Association des opposants au génocide (Francfort-sur-le-Main) “pour qu’il en prenne acte” et l’ont invité à “aborder la question du génocide arménien dans le cadre du dialogue politique entre la Suisse et la Turquie”. Il est donc naturel que le Conseil national entérine cette prise de position par une déclaration solennelle.
5. Le Conseil national souhaite par l’adoption de ce postulat contribuer à l’établissement d’une paix durable entre Turcs et Arméniens, paix qui ne peut s’établir que sur une vision commune et conforme à la vérité de l’histoire.
Prise de position du Conseil fédéral 15-05-2002
Le Conseil fédéral a plusieurs fois déjà, dans ses réponses à des interventions parlementaires – dont récemment le postulat Zisyadis 00.3245, “Génocide arménien. Reconnaissance par la Suisse”, du 6 juin 2000 – regretté et condamné les tragiques déportations en masse et les massacres qui ont marqué la fin de l’Empire Ottoman et ont fait de très nombreuses victimes dans la population arménienne. La Turquie ne conteste pas ces massacres, mais porte sur leur organisation délibérée par les personnalités au pouvoir à l’époque un jugement différent de celui de nombreux historiens et historiennes. Le Conseil fédéral estime que cette question relève de la recherche historique.
La politique extérieure de la Suisse vise à un équilibre durable dans le Caucase, en particulier entre la Turquie et l’Arménie. Dans ce contexte, il importe que le dialogue s’instaure dans la région elle-même. La question turco-arménienne a été soulevée à plusieurs reprises lors de contacts bilatéraux officiels avec la Turquie. Il y a par exemple été question des activités du comité de réconciliation turco-arménien et de l’accès des chercheuses et des chercheurs aux archives.
La conviction prévaut que, s’agissant d’un épisode douloureux de l’histoire, l’effort de mémoire collective doit être réalisé sur place, et avant tout par les pays concernés. La politique extérieure de la Suisse veut contribuer à l’entente turco-arménienne par le dialogue politique qui s’est instauré entre la Suisse et la Turquie en 2000 et qui porte notamment sur les droits de l’homme. L’adoption du postulat risquerait de porter atteinte au dialogue officiel et régulier qui a été établi.
Les cosignataires du postulat voudraient que leur démarche contribue à la paix durable entre la Turquie et l’Arménie en adressant un message de justice aux descendants des victimes arméniennes. Mais l’acceptation de ce postulat pourrait avoir l’effet contraire et ajouter encore à la charge émotionnelle qui pèse sur les relations entre la Turquie et l’Arménie.
Déclaration du Conseil fédéral 15-05-2002
Le Conseil fédéral propose de rejeter le postulat.
Chronologie:
08-12-2003 L’intervention est reprise par Monsieur de Bumann.
16-12-2003 CN Adoption.
Bulletin officiel – les procès-verbaux
Compétence Département des affaires étrangères (DFAE)
Cosignataires
Abate Fabio – Aeschbacher Ruedi – Bader Elvira – Baumann Ruedi – Baumann Stephanie – Beck Serge – Berberat Didier – Bugnon André – Bühlmann Cécile -Cavalli Franco – Chappuis Liliane – Chevrier Maurice – Chiffelle Pierre – Christen Yves – Cina Jean-Michel – Cuche Fernand – de Dardel Jean-Nils – Decurtins Walter – Donzé Walter – Dormann Rosmarie – Dormond Béguelin Marlyse – Eberhard Toni – Eggly Jacques- Simon – Ehrler Melchior – Estermann Heinrich – Fasel Hugo – Fässler-Osterwalder Hildegard – Fattebert Jean – Fehr Jacqueline – Fehr Mario – Fehr Hans-Jürg – Fetz Anita – Galli Remo – Garbani Valérie – Genner Ruth – Glasson Jean-Paul – Glur Walter – Goll Christine – Graf Maya – Grobet Christian – Gross Andreas – Gross Jost – Guisan Yves – Günter Paul -Gysin Remo – Haering Barbara – Haller Ursula – Hämmerle Andrea – Hess Walter – Hofmann Urs – Hollenstein Pia – Hubmann Vreni – Imfeld Adrian – Imhof Rudolf – Janiak Claude – Jossen-Zinsstag Peter – Lachat François – Lauper Hubert – Leu Josef – Leutenegger Oberholzer Susanne – Leuthard Doris – Loepfe Arthur – Lustenberger Ruedi – Maillard Pierre-Yves – Maitre Jean-Philippe – Mariétan Fernand – Marti Werner – Marty Kälin Barbara – Mathys Hans Ulrich – Maury Pasquier Liliane – Meier-Schatz Lucrezia – Menétrey-Savary Anne-Catherine – Meyer Thérèse – Mugny Patrice – Müller- Hemmi Vreni – Neirynck Jacques – Pedrina Fabio – Pelli Fulvio – Raggenbass Hansueli – Randegger Johannes – Rechsteiner Paul – Rechsteiner Rudolf – Rennwald Jean-Claude – Robbiani Meinrado – Rossini Stéphane – Ruey Claude – Scheurer Rémy – Schmid Odilo – Simoneschi-Cortesi Chiara – Sommaruga Simonetta – Spielmann Jean – Strahm Rudolf – Studer Heiner – Stump Doris – Suter Marc F. – Teuscher Franziska -Thanei Anita – Tillmanns Pierre – Tschäppät Alexander – Vallender Dorle – Vaudroz René – Vermot-Mangold Ruth-Gaby – Vollmer Peter – Walker Felix – Widmer Hans – Widrig Hans Werner – Wiederkehr Roland – Wyss Ursula – Zäch Guido – Zanetti Roberto – Zapfl Rosmarie – Zbinden Hans – Zisyadis Josef (113)
Descripteurs
Verbrechen gegen die Menschlichkeit; Armenien-Frage; Armenien; Türkei; Erster Weltkrieg; Vergangenheit; Opfer unter der Zivilbevölkerung; diplomatische Beziehungen; 08;
02.3069 – Postulate.
Recognition of the Armenian Genocide of 1915
Text submitted
The National Council recognizes the 1915 genocide of the Armenians. It asks the Federal Council to take note of it and transmit its position through the usual diplomatic channels.
Development
1. The extermination of Armenians in the Ottoman Empire during the First World War destroyed more than a million people deported and massacred by order of Ottoman authorities. These facts, unmistakable in their meaning and scope, served as a reference to Raphael Lemkin, the jurist who defined the notion of genocide. The standards set by the United Nations in the 1948 Convention correspond exactly to the process of destruction suffered by the Armenians.
2. By recognizing the Armenian Genocide, Switzerland renders justice to victims, survivors and their descendants, and contribute to the prevention of other crimes against humanity. This is a decisive step by which Switzerland will demonstrate its commitment to human rights, respect for minorities and international criminal justice. It also recalls the undeniable nature of crimes against humanity and seeks to contribute to the fight against Holocaust denial.
3. The genocide of Armenians was recognized by the United Nations in 1985 through the adoption of the report of one of its committees of experts, the Sub-Commission on the Prevention of Discrimination and Protection of Minorities, then by the European Parliament in a resolution in 1987. In recent years the French, Swedish and Italian parliaments have done the same, as have many parliaments in Europe and elsewhere. The Canton of Geneva has done so twice: by the Grand Council in 1998 and by the Council of State last December. Finally, we can mention the World Council of Churches positions, through the Declaration adopted in 1983.
4. On 13 March 2001 the National Council, following a unanimous decision by the Foreign Affairs Committees of both Houses, transmitted to the Federal Council the petition of the Association of Opponents of Genocide (Frankfurt am Main) and to “address the issue of the Armenian Genocide in the framework of the political dialogue between Switzerland and Turkey.” It is therefore natural that the National Council should endorse this position by a solemn declaration.
5. The National Council wants the adoption of this postulate contribute to the establishment of lasting peace between Turks and Armenians, peace cannot be built but upon a common vision and a truthful history.
Position of the Federal Council 15-05-2002
The Federal Council has repeatedly expressed regret and condemnation of the tragic mass deportations and massacres that have taken place in its replies to parliamentary interventions, including recently the Zisyadis postulate 00.3245, “Armenian genocide, Recognition by Switzerland” of 6 June 2000 regretting and condemning the tragic mass deportations and massacres that marked the end of the Ottoman Empire and caused many victims in the Armenian population. Turkey does not deny the killings, but covers their deliberate organization by the people in power at the time, a judgment different from that of many historians. The Federal Council views this question as a matter for historical research.
Switzerland’s foreign policy aims at a lasting balance in the Caucasus, in particular between Turkey and Armenia. In this context, it is important that dialogue be established in the region itself. The Turkish-Armenian question has been raised on several occasions during official bilateral contacts with Turkey. For example, the activities of the Turkish-Armenian reconciliation committee and the access of researchers to the archives were discussed. The conviction prevails that, as a painful episode in history, the collective memory effort must be carried out on the spot, and above all by the countries concerned. Switzerland’s foreign policy aims to contribute to the Turkish-Armenian understanding through the political dialogue between Switzerland and Turkey in 2000, which focuses on human rights. The adoption of the postulate could undermine the formal and regular dialogue that has been established.
The co-signatories of the postulate would like their action to contribute to the lasting peace between Turkey and Armenia by sending a message of justice to the descendants of the Armenian victims. But the acceptance of this postulate could have the opposite effect and add to the emotional burden that weighs on the relations between Turkey and Armenia.
Statement of the Federal Council 15-05-2002
The Federal Council proposes rejecting the postulate.
02.3069 – Postulat
Reconnaissance du génocide des Arméniens de 1915
Texte déposé
Le Conseil national reconnaît le génocide des Arméniens de 1915. Il demande au Conseil fédéral d’en prendre acte et de transmettre sa position par les voies diplomatiques usuelles.
Développement
1. L’extermination des Arméniens de l’Empire Ottoman pendant la Première Guerre mondiale a anéanti plus d’un million de personnes déportées et massacrées sur l’ordre du pouvoir ottoman. Ces faits, incontestables dans leur signification et leur ampleur, ont servi de référence à Raphaël Lemkin, le juriste qui a défini la notion de génocide. Les normes fixées par l’ONU dans la Convention de 1948 correspondent très exactement au processus de destruction subi par les Arméniens.
2. Par la reconnaissance du génocide des Arméniens, la Suisse rendra justice aux victimes, aux rescapés et à leurs descendants et contribuera à la prévention d’autres crimes contre l’humanité. C’est un geste décisif par lequel la Suisse montrera son engagement pour les droits de l’homme, le respect des minorités et la justice pénale internationale. Elle rappelle en outre le caractère imprescriptible des crimes contre l’humanité et entend contribuer à la lutte contre le négationnisme.
3. Le génocide des Arméniens a été reconnu par l’ONU en 1985 à travers l’adoption du rapport d’une de ses commissions d’experts, la sous-commission pour la prévention des discriminations et pour la protection des minorités, puis par le Parlement européen dans une résolution en 1987. Au cours de ces dernières années, les parlements français, suédois et italien ont fait de même, ainsi que de nombreux parlements en Europe et ailleurs. Le canton de Genève l’a fait à deux reprises: par le Grand Conseil en 1998 et par le Conseil d’Etat en décembre dernier. On peut citer enfin les prises de position du Conseil oecuménique des Églises, à travers la Déclaration adoptée en 1983.
4. Le 13 mars 2001, le Conseil national, après décision unanime des Commissions de politique extérieure des deux Chambres, a transmis au Conseil fédéral la pétition de l’Association des opposants au génocide (Francfort-sur-le-Main) “pour qu’il en prenne acte” et l’ont invité à “aborder la question du génocide arménien dans le cadre du dialogue politique entre la Suisse et la Turquie”. Il est donc naturel que le Conseil national entérine cette prise de position par une déclaration solennelle.
5. Le Conseil national souhaite par l’adoption de ce postulat contribuer à l’établissement d’une paix durable entre Turcs et Arméniens, paix qui ne peut s’établir que sur une vision commune et conforme à la vérité de l’histoire.
Avis du Conseil fédéral du 15.05.2002
Le Conseil fédéral a plusieurs fois déjà, dans ses réponses à des interventions parlementaires – dont récemment le postulat Zisyadis 00.3245, “Génocide arménien. Reconnaissance par la Suisse”, du 6 juin 2000 – regretté et condamné les tragiques déportations en masse et les massacres qui ont marqué la fin de l’Empire Ottoman et ont fait de très nombreuses victimes dans la population arménienne. La Turquie ne conteste pas ces massacres, mais porte sur leur organisation délibérée par les personnalités au pouvoir à l’époque un jugement différent de celui de nombreux historiens et historiennes. Le Conseil fédéral estime que cette question relève de la recherche historique.
La politique extérieure de la Suisse vise à un équilibre durable dans le Caucase, en particulier entre la Turquie et l’Arménie. Dans ce contexte, il importe que le dialogue s’instaure dans la région elle-même. La question turco-arménienne a été soulevée à plusieurs reprises lors de contacts bilatéraux officiels avec la Turquie. Il y a par exemple été question des activités du comité de réconciliation turco-arménien et de l’accès des chercheuses et des chercheurs aux archives. La conviction prévaut que, s’agissant d’un épisode douloureux de l’histoire, l’effort de mémoire collective doit être réalisé sur place, et avant tout par les pays concernés. La politique extérieure de la Suisse veut contribuer à l’entente turco-arménienne par le dialogue politique qui s’est instauré entre la Suisse et la Turquie en 2000 et qui porte notamment sur les droits de l’homme. L’adoption du postulat risquerait de porter atteinte au dialogue officiel et régulier qui a été établi.
Les cosignataires du postulat voudraient que leur démarche contribue à la paix durable entre la Turquie et l’Arménie en adressant un message de justice aux descendants des victimes arméniennes. Mais l’acceptation de ce postulat pourrait avoir l’effet contraire et ajouter encore à la charge émotionnelle qui pèse sur les relations entre la Turquie et l’Arménie.
Proposition du Conseil fédéral du 15.05.2002
Le Conseil fédéral propose de rejeter le postulat.
Article 261bis du Code pénal suisse
La norme pénale contre la discrimination raciale
La norme pénale contre la discrimination raciale protège la dignité et la valeur humaines. L’article 261bis du Code pénal suisse (CP) et l’art. 171c du Code militaire suisse (CPM) déclarent punissables les actes de refus explicite ou implicite d’accorder à des êtres humains l’égalité des droits ou même le droit à l’existence en raison de la couleur de leur peau ou de leur origine ethnique ou culturelle. Mais ces actes ne sont interdits que s’ils sont commis publiquement, c’est à-dire s’il n’y a aucun lien personnel ou une relation de confiance entre les personnes présentes. Aux termes des articles 2 et 4 de cette convention, la création d’une norme pénale contre le racisme faisait partie des devoirs de la Suisse. La teneur exacte de la norme pénale est la suivante:
– Celui qui, publiquement, aura incité à la haine ou à la discrimination envers une personne ou un groupe de personnes en raison de leur appartenance raciale, ethnique ou religieuse;
– celui qui, publiquement, aura propagé une idéologie visant à rabaisser ou à dénigrer de façon systématique les membres d’une race, d’une ethnie ou d’une religion;
– celui qui, dans le même dessein, aura organisé ou encouragé des actions de propagande ou y aura pris part;
– celui qui aura publiquement, par la parole, l’écriture, l’image, le geste, par des voies de fait ou de toute autre manière, abaissé ou discriminé d’une façon qui porte atteinte à la dignité humaine une personne ou un groupe de personnes en raison de leur race, de leur appartenance ethnique ou de leur religion ou qui, pour la même raison, niera, minimisera grossièrement ou cherchera à justifier un génocide ou d’autres crimes contre l’humanité;
– celui qui aura refusé à une personne ou à un groupe de personnes, en raison de leur appartenance raciale, ethnique ou religieuse, une prestation destinée à l’usage public,
– sera puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire.
MARCH 2005 245 ( R.1 / 05)
REPORT OF THE GRAND COUNCIL OF STATE
The Massimo Sandri postulate and others asking the Council of State take steps to officially recognize the Armenian genocide of 1915
And
RESPONSE OF STATE COUNCIL
The interpellation of Massimo Sandri and others on recognition of the Armenian Genocide
Reminder of the postulate
In 1915 during the First World War, the troops of the Ottoman army massacred more than a million Armenians. A brave people of Armenian origin displaced: its eastern regions, formerly occupied by Russia, formed the smallest of the Soviet republics, or were absorbed by Iran, while the massacres of survivors of the vast Western region emigrated to Western Europe and overseas.
Since then the Armenians have been fighting for the memory of the genocide. If the Treaty of Sèvres of 1920 recognized the Armenian political fact, the Treaty of Lausanne 1923 between Turkey and the allies emerged victorious from the war, stripped Armenia off the map, while not mentioning the extent of atrocities including this population has suffered.
It is here in Lausanne that eighty years of the fate of Armenia was sealed. The time has come for the Canton of Vaud to recognize by a solemn act the tragedy of the persecution of the Armenians. This act could be in both in Lausanne to Yerevan, a plaque in memory of the men and women killed in the horrible killings of 1915, and an approach of the State Council, supported by the Grand Council, with the federal authorities, Switzerland engaging in the same direction. By the adoption of this postulate, the Canton of Vaud would contribute to the establishment of a just and lasting peace between Turks and Armenians, whose peace’s main obstacle today is “denial” that holds and strengthens the pain and trauma of an entire population. It is important to remember that this genocide was recognized by the UN in 1985 and by the European Parliament in 1987.
In recent years many European parliaments have done the same, including the French, Swedish and Italians. In Switzerland, the Armenian Genocide has been formally recognized by the Grand Council of Geneva in 1998 by the State Council of the same township in 2001. Furthermore, an object created by National Councillor Jean-Claude Vaudroz will soon be treated by the Federal Parliament. A gaping wound opened in the Armenian spirit and facing the tragic disappearances, little room remains for reparation and forgiveness. Only the working memory may help to restore dignity to those and those who were swallowed up forever.
Recall the interpellation
On 23 September 2003 , the Grand Council voted and supported by a large majority the reference to the State Council a premise for an act of recognition of Armenian genocide of 1915 :
” … This act could be in the building , both in Lausanne to Yerevan a plaque in memory of the men and women killed in horrific killings of 1915, and an approach of the State Council , supported by the Grand Council , to the federal authorities , engaging in Switzerland same direction … “
More than a year has passed and no action was taken on this premise . Thisis in contradiction with Article 134 of the Law on the Grand Council ,” the State Council meets in a period of one year at least as an interim report . “
Furthermore, it is noted that on 24 April 2005, important celebrations will likely be celebrated in Switzerland and Europe, in commemorating the 90th anniversary of the Genocide. In the view above, I have the honor to ask the following questions:
1. Has the Council of State retained a significant workload that prevented him from responding in time ? Or do other reasons exist that we should know?
2. In anticipation of the 24th April 2005, the State Council thinks that he should give a worthy response to the expectations raised by the public of our region by the position taken by the Grand Waldensian Board ?
Reply
1. THE ISSUE RAISED BY THE ASSUMPTION
The premise of Mr. Sandri MP asks a difficult question and is conflictual. Indeed, recognition of the Armenian genocide is a debate that agitated the Armenian and Turkish communities and various national and international authorities for decades.
2. THE QUESTION OF RECOGNITION OF THE ARMENIAN GENOCIDE
For the State Council, the issue of recognition of the Armenian Genocide is divided into three parts , the historical aspect , legal aspect and diplomatic component.
2.1 Historically
Resulting from the merger of Aboriginal people residing around Lake Van an Indo-European tribe appeared around the seventh century . av. J.C. , the
Armenian people were the component of competition between kingdoms and empires of the region and were often seen carved up in power relations ( Roman invasion , conquered by the Arabs , battles between Byzantines and Turks, shared territory between Turks and Persian Empire, Russian).
The outbreak of World War I led to the Ottoman authorities committing various crimes against the Armenians, where the decomposition of the empire in order to create a united national state created a climate of suspicion. The transactions leading to massacres in question in the postulate of M. Sandri MP begin April 24, 1915, when a first roundup to behead the Armenian nation was launched. In May, the deportations mass begun; they aimed to move the Armenians. The result of these massacres was between 1.5 million deaths according to the Armenians and 800,000 from the Turkish Ministry of Interior, who articulated this figure in 1919. Approximately, it is two-thirds of the population. In the context of the Soviet revolution of 1917 and movements of Caucasian nationalists, a tiny Armenian republic began in 1918. Despite the struggles for territorial extension, the Republic was squeezed between Ankara and Moscow. The Treaty of Sevres (1920) was supposed to recognize a free and independent Armenian state extended to provinces in Eastern Anatolia. But Turkey, signed and did not ratify the treaty, pushing Armenians, confining them to a territory only slightly less cramped than before.
In 1923, the Treaty of Lausanne, canceling the Treaty of Sevres, no longer mentions the creation of Armenia corresponding to the historical claims. This treaty, setting boundaries for the country, is the founder of modern Turkey. From 1920 to 1991, Armenia was a Soviet republic alongside its neighbors in the Caucasus.
The 1915 events are historically attested by many sources. These are the first testimonies of various actors of the time, be they civilians, soldiers, missionaries, diplomats and survivors themselves. Secondly, it is the archives of the countries involved in the First World War (Russian archives, Italian, German, Austrian, French, etc., and even Turkey). All these sources allow us to draw the Armenian massacres on a table. The question is whether these killings can be characterized as genocide.
2.2 Legally
The definition of genocide in the agreement of the prevention and punishment of the Crime of Genocide (Genocide Convention) concluded in December 9, 1948 by the General Assembly of the United Nations. This agreement stipulates in Article II:
“In the present Convention, genocide means any of the the following acts committed with intent to destroy, in whole or in part a national, ethnic, racial or religious group, as such:
a) Killing members of the group
b) Causing serious bodily or mental harm to members of the group
c) Deliberately inflicting on the group conditions of life calculated to
bring about its physical destruction
d) Imposing measures intended to prevent births within the group
e) Forcibly transferring children of the group to another group “
Within the United Nations, a subcommittee of the Committee on Human Rights has considered the matter. The report, dated 1985 mentions the 1915 massacre of Armenians as the first genocide of the twentieth century. The question of “intentionality” is fundamental in the debate around the Armenian Genocide and is at the heart of the argument of those who oppose the 1915 massacres as Genocide.
In this context, it is thus often said that there is no historical source formally attesting the deliberate intention of the Turkish authorities to destroy the Armenian community.
2.3 Diplomatically
2.3.1 Internationally
To date, the national parliaments of the following countries have recognized the Armenian Genocide: Uruguay, Cyprus, Argentina, Russia, Armenia, Greece, Lebanon,
Belgium, Italy, and France.
2.3.2 In the Swiss plane
The national debate actually began in 1995 on the occasion of a interpellation of the National Council requesting the Council Fankhauser Federal to recognize the Armenian Genocide. If the Federal Government in his reply, regretted the massacres of 1915, he refused a recognition of genocide as such, arguing in particular that Switzerland had not adopted the UN Convention in 1948
The next step was the submission in 1998 of a motion calling Ziegler demanding the Federal Council to recognize the Armenian Genocide. At this occasion, the Federal Council, observing the procedures carried out abroad, stated that it was rather the responsibility of the legislature to recognize such a crime. In 2000, the Zisyadis MP filed a postulate taking the same request. Treaty in March 2001 gave rise to an important debate in the National Council and was only rejected by a narrow majority of 3 votes (73:70).
The third Swiss act of this process was the discussion and decision taken around the premise of Vaudroz reverberating again the recognition of the Armenian genocide. Against the opinion of the Federal Council, the Great House has indeed accepted this text on December 15, 2003 by 107 votes against 67. The National Council asks the federal Government to take note of the fact that it recognizes the Armenian Genocide and to transmit this position by the usual diplomatic channels. Departing precedent texts, the Vaudroz postulate provides for recognition by the legislative, considering that, for diplomatic reasons, it was better to hold Federal Council on the sidelines. Note that the decision of the National Council on 15 December 2003 actually makes obsolete the request of Mr. MP Sandri. The ratification of this text was, however, on 24 March 2001 asking to take steps with the Confederation to for recognition of the Armenian Genocide.
Note that the position of the Federal Council during the debate was to admit and regret the existence of massacres perpetrated by the Ottomans against the Armenians in 1915, but to leave it to historians to know whether or not to qualify as genocide.
In its response, the Federal Council regretted and condemned the tragic mass deportations and massacres that marked the end of the Ottoman Empire and caused the death of an extremely high number of Armenians. For the Swiss Government, there is no doubt that this is a painful chapter and difficult history of Turkey – which should not remain taboo – and it is important for each country to make a work of collective memory, even on dark events although it is difficult. For the Federal Council, the question that arises is the attitude that Switzerland is expected to address these tragic events of nearly a century ago. The Federal Council’s policy focuses on political regular dialogue with Turkey and seeks a sustainable balance in the Caucasus,
particularly peaceful relations between Turkey and Armenia.
Under this dialogue, Switzerland has repeatedly addressed the Armenian question and encouraged Turkey to adopt a more conciliatory policy towards Armenia. It turned out that the Armenian issue could be discussed enough openly in Turkey and that historians could lead to it with their research.
However, political declarations from abroad do not have the desired effect. When the story is concerned, external pressures are often felt to be unjust: Switzerland made itself experience in the recent past. From the view of the Federal Council, the acceptance of Vaudroz postulate, instead of being understood as a message of justice by both parties, could therefore have the opposite effect and add to the emotional burden on the Armenian question.
3. THE POSITION OF THE COUNCIL OF STATE
The State Council may stand politically in the debate on the question of recognition of the Armenian Genocide. Thus, for the Council of State, all historical analyzes converges to the fact that in 1915 the Ottoman government ordered massacres against the Armenian population.In this context, the position of the State Council is the same as that of the Federal Council: he admits, and regrets the existence of massacres perpetrated by the Ottomans against the Armenians in 1915, but leaves it to historians to qualify them as genocide or not. The evaluation of the massacres perpetrated against the Armenians in the years 1915-1916 is a historical problem and therefore an object of study for history. The question of whether these massacres were committed intentionally – and thus approach the crime of genocide – thus falls in historical research. In addition, the UN definition of genocide (1948 Convention) follows World War II and the Holocaust. It is legally questionable to apply a concept (“genocide”) appeared before the Holocaust.
The highly sensitive nature of this issue can lead to danger: the quality of relations between Turkey and Switzerland. The State Council calls on Turkey and Armenia to build renewed and peaceful relationships with the Armenian population. Only the work of memory on such dramatic events can indeed contribute not only to prevent such crimes from recurring, but also to reconcile the various protagonists.
– Take note of the State Council to the Great Council report on the Massimo Sandri postulate and others, asking the Council of State take steps to officially recognize the genocide Armenian 1915, and on the inquiry Massimo Sandri and others, on recognition of the Armenian Genocide.
Thus adopted at the meeting of the State Council, in Lausanne on 12 January 2005.
The Chair: The Chancellor:
A.-C. Lyon V. Grandjean
RAPPORT DU CONSEIL D’ETAT AU GRAND CONSEIL sur le postulat Massimo Sandri et consorts demandant au Conseil d’Etat de prendre des mesures propres à reconnaître officiellement le génocide arménien de 1915
et
REPONSE DU CONSEIL D’ETAT à l’interpellation Massimo Sandri et consorts concernant la reconnaissance du génocide arménien
Rappel du postulat En
1915 durant la première guerre mondiale, les troupes de l’armée ottomane massacrent plus d’un million d’Arméniens. Un peuple valeureux aux origines bimillénaires était ainsi disloqué : ses régions orientales, jadis occupées par la Russie, formaient la plus petite des républiques soviétiques, ou encore étaient absorbées par l’Iran, alors que les survivants des massacres de la vaste région occidentale, émigrent en masse en Europe occidentale et outre-Atlantique.
Depuis lors les Arméniens se battent pour la mémoire du génocide. Si le Traité de Sèvres de 1920 a reconnu le fait politique arménien, le Traité de Lausanne de 1923 entre la Turquie et les alliés sortis victorieux de la guerre, a rayé l’Arménie de la carte, tout en ne mentionnant pas l’ampleur des exactions dont cette population a été victime.
C’est donc ici à Lausanne que, il y a quatre-vingt ans, le destin de l’Arménie a été scellé. Le moment est venu pour le canton de Vaud de reconnaître par un acte solennel le drame de la persécution des Arméniens.
Cet acte pourrait consister en l’édification, tant à Lausanne qu’à Erevan, d’une plaque à la mémoire des hommes et des femmes massacrés dans les horribles tueries de 1915, et en une démarche du Conseil d’Etat, appuyé du Grand Conseil, auprès des autorités fédérales, engageant la Suisse dans la même direction.
Par l’adoption du présent postulat, le canton de Vaud contribuerait ainsi à l’établissement d’une paix juste et durable entre Turcs et Arméniens, paix dont l’obstacle principal réside aujourd’hui dans un « négationnisme » qui maintient et renforce la douleur, ainsi que le traumatisme de toute une population.
Il est important de rappeler que ce génocide a été reconnu par l’ONU en 1985 et par le Parlement européen en 1987. Au cours de ces dernières années de nombreux parlements européens ont fait de même, dont les Français, Suédois et Italiens.
En Suisse, le génocide arménien a été officiellement reconnu par le Grand Conseil genevois en 1998 et par le Conseil d’Etat du même canton en 2001. De plus, un objet déposé par le conseiller national Jean-Claude Vaudroz sera bientôt traité par le Parlement fédéral. Une blessure béante est ouverte dans la sensibilité arménienne et, face au tragique des disparitions, peu de place reste pour la réparation et le pardon. Seul le travail de la mémoire pourrait contribuer à restituer la dignité à celles et à ceux qui ont été engloutis à tout jamais.
Rappel de l’interpellation
Le 23 septembre 2003, le Grand Conseil a voté et soutenu à une large majorité le renvoi au Conseil d’Etat d’un postulat visant un acte de reconnaissance du génocide arménien de 1915 :
“… Cet acte pourrait consister en l’édification, tant à Lausanne qu’à Erevan, d’une plaque à la mémoire des hommes et des femmes massacrés dans les horribles tueries de 1915, et une démarche du Conseil d’Etat, appuyée par le Grand Conseil, auprès des autorités fédérales, engageant la Suisse dans la même direction…”
Plus d’une année s’est écoulée et aucune suite n’a été donnée à ce postulat. Ceci est en contradiction avec l’article 134 de la loi sur le Grand Conseil : “le Conseil d’Etat répond dans un délai d’une année à tout le moins sous forme d’un rapport intermédiaire.
Par ailleurs, il est à signaler que le 24 avril 2005, des manifestations importantes seront vraisemblablement célébrées, en Suisse et en Europe, en commémoration du 90ème anniversaire du début du génocide.
Au vu de ce qui précède, j’ai l’honneur de présenter les questions suivantes :
1. Le Conseil d’Etat a-t-il été retenu par une importante surcharge de travail l’ayant empêché de répondre dans les temps ? Ou est-ce que d’autres raisons que nous souhaiterions connaître sont à l’origine de son retard ?
2. En prévision de la journée du 24 avril 2005, le Conseil d’Etat ne pense-t-il pas qu’il devrait donner une réponse digne des attentes suscitées auprès de l’opinion publique de notre région par la prise de position du Grand Conseil vaudois ?
Réponse
1. LA PROBLEMATIQUE POSEE PAR LE POSTULAT
Le postulat de M. le Député Sandri pose une question difficile et, plus encore, conflictuelle. En effet, la reconnaissance du génocide arménien est un débat qui agite tant les communautés arménienne et turque que divers parlements et autorités nationales et internationales depuis des décennies.
2. LA QUESTION DE LA RECONNAISSANCE DU GÉNOCIDE ARMÉNIEN
Pour le Conseil d’Etat, la question de la reconnaissance du génocide arménien se décompose en trois volets, le volet historique, le volet juridique et le volet diplomatique.
2.1 Sur le plan historique
Issu de la fusion d’une population autochtone résidant autour du lac de Van et d’une peuplade indo-européenne apparue aux alentours du VIIe s. av. J.C., le peuple arménien fut, tout au long de son histoire, l’enjeu d’une concurrence entre royaumes et empires de la région et s’est souvent vu dépecé en fonction des rapports de force du moment (invasion romaine, conquis par les Arabes, luttes entre Byzantins et Turcs, territoire partagé entre Turcs et Perses, Empire russe).
Le déclenchement du premier conflit mondial conduit les autorités ottomanes à perpétrer divers crimes à l’encontre des Arméniens, ceci sur fond de décomposition de l’empire, de volonté de créer un Etat national uni et dans un climat de suspicion généralisé.
Les opérations menant aux massacres dont il est question dans le postulat de M. le député Sandri débutent le 24 avril 1915, date à laquelle une première rafle visant à décapiter la nation arménienne est lancée. En mai, les déportations de masse commencent ; elles visent à déplacer les Arméniens.
Le bilan de ces massacres est fixé entre 1,5 million de morts selon les Arméniens et 800’000 d’après le Ministère de l’intérieur turc, qui articula ce chiffre en 1919. Approximativement, il s’agit des deux tiers de la population arménienne qui résidait en Turquie.
Dans le contexte de la révolution soviétique de 1917 et des mouvements nationalistes caucasiens, naît une minuscule république arménienne en 1918. Malgré les luttes pour une extension territoriale, la république est prise en tenaille entre Ankara et Moscou. Le traité de Sèvres (1920) était censé reconnaître un Etat arménien libre et indépendant étendu aux provinces de l’Anatolie orientale. Mais la Turquie, signant, mais ne ratifiant pas le traité, repousse les Arméniens, les confinant à un territoire à peine moins exigu qu’auparavant.
En 1923, le traité de Lausanne, annulant le traité de Sèvres, entérine le rapport de force sur le terrain et ne mentionne plus la création d’une Arménie correspondant au territoire national historique. Ce traité, en fixant les frontières du pays, est fondateur de la Turquie moderne.
De 1920 à 1991, l’Arménie sera une république soviétique au même titre que ses voisines du Caucase.
Les événements de 1915 sont historiquement attestés par de nombreuses sources. Il s’agit en premier lieu de témoignages de divers acteurs de l’époque, qu’il s’agisse de civils, de militaires, de missionnaires, de diplomates ou de rescapés eux-mêmes. En second lieu, il s’agit des archives des pays impliqués dans le premier conflit mondial (archives russes, italiennes, allemandes, autrichiennes, françaises, etc., voire même turques). L’ensemble de ces sources permet de dresser le tableau de massacres des Arméniens sur l’ensemble de la Turquie. La question est de savoir si ces massacres peuvent être qualifiés de génocide en tant que tel.
2.2 Sur le plan juridique
La définition d’un génocide figure dans l’accord sur la prévention et la punition du crime de génocide (Convention sur le génocide) conclu le 9 décembre 1948 par l’Assemblée générale des Nations Unies. Cette convention stipule en son article II:
« Dans la présente Convention, le génocide s’entend de l’un quelconque des actes ci-après, commis dans l’intention de détruire, en tout ou partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel:
a) Meurtre de membres du groupe
b) Atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe
c) Soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle
d) Mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe
e) Transfert forcé d’enfants du groupe à un autre groupe »
Au sein des Nations Unies, une sous-commission de la commission des droits humains s’est penchée sur la question. Son rapport, datant 1985, mentionne le massacre des Arméniens de 1915 comme étant le premier génocide du XXe s.
La question de « l’intentionnalité » est fondamentale dans le débat autour du génocide arménien et se situe au cœur de l’argumentaire de ceux qui contestent que les massacres de 1915 revêtent le caractère de génocide. Dans ce cadre, il est ainsi souvent affirmé qu’il n’existe aucune source historique attestant formellement d’une intention délibérée des autorités ottomanes de détruire la communauté arménienne.
2.3 Sur le plan diplomatique
2.3.1 Au plan international
A ce jour, les parlements nationaux des pays suivants ont reconnu le génocide arménien: Uruguay, Chypre, Argentine, Russie, Arménie, Grèce, Liban, Belgique, Italie, et France.
Certains organismes internationaux ont également reconnu le génocide arménien, tels le Parlement européen, la Communauté des Etats indépendants, le Conseil œcuménique des Eglises ou le Tribunal permanent des peuples.
Toutefois, selon les informations obtenues, plusieurs pays qui ont débattu de cette question ont finalement renoncé à une reconnaissance du génocide par le parlement national : Suède, Etats-Unis, Allemagne et Grande-Bretagne, parmi d’autres. Au niveau de l’ONU également, aucune instance politique comme l’Assemblée générale ou le Conseil de sécurité n’a formellement reconnu le génocide.
2.3.2 Au plan helvétique
Le débat au niveau national a réellement débuté en 1995 à l’occasion d’une interpellation de la Conseillère nationale Fankhauser demandant au Conseil fédéral de reconnaître le génocide arménien. Si le Gouvernement fédéral, dans sa réponse, regretta les massacres de 1915, il refusa une reconnaissance du génocide en tant que telle, arguant notamment que la Suisse n’avait pas adopté la Convention de l’ONU de 1948.
L’étape suivante fut le dépôt, en 1998, d’une motion Ziegler demandant également au Conseil fédéral de reconnaître le génocide arménien. A cette occasion, le Conseil fédéral, observant les démarches effectuées à l’étranger, affirma qu’il était plutôt du ressort du pouvoir législatif de reconnaître un tel crime. En 2000, le député Zisyadis déposa un postulat reprenant la même demande. Traité en mars 2001, ce texte donna lieu à un important débat au Conseil national et ne fut rejeté que par une courte majorité de 3 voix (73:70).
Le troisième acte helvétique de cette démarche fut la discussion et la décision prise autour du postulat Vaudroz répercutant encore une fois la revendication d’une reconnaissance du génocide arménien. Contre l’avis du Conseil fédéral, la grande Chambre a en effet accepté ce texte le 15 décembre 2003 par 107 voix contre 67.
Le Conseil national demande ainsi au Gouvernement fédéral de prendre acte du fait qu’il reconnaît le génocide arménien et de transmettre cette position par les voies diplomatiques usuelles. Se démarquant des textes précédents, le postulat Vaudroz prévoit donc une reconnaissance par le législatif, estimant que, pour des raisons diplomatiques, il valait mieux tenir le Conseil fédéral à l’écart. Signalons que la décision du Conseil national du 15 décembre 2003 rend de fait caduque la requête de M. le Député Sandri demandant d’entreprendre des démarches auprès de la Confédération en vue de demander une reconnaissance du génocide arménien.
Mentionnons que la position du Conseil fédéral au cours de ces débats a été d’admettre et de regretter l’existence de massacres perpétrés par les Ottomans contre les Arméniens en 1915, mais de laisser aux historiens le soin de savoir s’il convient de les qualifier ou non de génocide.
Dans sa réponse, le Conseil fédéral a regretté et condamné les tragiques déportations en masse et les massacres qui ont marqué la fin de l’Empire ottoman et causé la mort d’un nombre extrêmement élevé d’Arméniens. Pour le Gouvernement suisse, il ne fait pas de doute qu’il s’agit là d’un chapitre douloureux et délicat de l’histoire de la Turquie – qui ne doit pas rester tabou – et il est important pour chaque Etat de faire un travail de mémoire collective, même sur des événements sombres de son histoire et même s’il s’agit d’un travail difficile.
Pour le Conseil fédéral, la question qui se pose est celle de l’attitude que la Suisse devrait avoir face à ces événements tragiques survenus il y a près d’un siècle. La politique du Conseil fédéral met l’accent sur le dialogue politique régulier avec la Turquie et vise à un équilibre durable dans le Caucase, en particulier à des relations apaisées entre la Turquie et l’Arménie. Dans le cadre de ce dialogue, la Suisse a plusieurs fois abordé la question arménienne et encouragé la Turquie à adopter une politique plus conciliante à l’égard de l’Arménie. Il s’est avéré que la question arménienne pouvait être discutée assez ouvertement en Turquie et que les historiens pouvaient y conduire leurs recherches. En revanche, les déclarations politiques émanant de l’étranger n’ont pas l’effet souhaité. Lorsque l’histoire est en cause, les pressions extérieures sont souvent ressenties comme étant injustes : la Suisse elle-même en a fait l’expérience dans un passé récent.
De l’avis du Conseil fédéral, l’acceptation du postulat Vaudroz, au lieu d’être comprise comme un message de justice par les deux parties, pouvait donc avoir l’effet contraire et ajouter encore à la charge émotionnelle qui pèse sur la question arménienne.
3. LA POSITION DU CONSEIL D’ETAT
Le Conseil d’Etat ne peut, dans le débat sur la question de la reconnaissance du génocide arménien, que se placer sur le plan politique.
Ainsi, pour le Conseil d’Etat, l’ensemble des analyses historiques convergent vers ce constat que, en 1915, le gouvernement ottoman a ordonné la perpétration de massacres à l’encontre de la population arménienne.
Dans ce cadre, la position du Conseil d’Etat est la même que celle du Conseil fédéral : il admet et regrette l’existence de massacres perpétrés par les Ottomans contre les Arméniens en 1915, mais laisse aux historiens le soin de savoir s’il convient de les qualifier de génocide ou non.
L’évaluation des massacres perpétrés contre les Arméniens dans les années 1915-16 est un problème historique et par conséquent un objet d’étude pour la science de l’histoire. La question de savoir si ces massacres furent commis intentionnellement – et donc se rapprochent du crime de génocide – relève donc de la recherche historique.
En outre, la définition de génocide de l’ONU (Convention de 1948) fait suite à la Seconde Guerre mondiale et à l’Holocauste. Il est juridiquement discutable d’appliquer une notion (« génocide ») apparue suite à l’Holocauste à des faits qui lui sont antérieurs de plusieurs décennies.
Le caractère extrêmement sensible de cette question peut induire un danger pour la qualité des relations entre la Turquie et la Suisse. Le Gouvernement cantonal estime ne pas avoir à entraîner, par sa prise de position, de regrettables complications diplomatiques entre les deux pays.
Le Conseil d’Etat invite la Turquie et l’Arménie à construire des relations renouvelées et pacifiques avec la population arménienne. Seul le travail de mémoire sur des événements aussi dramatiques peut en effet contribuer, non seulement à prévenir que de tels crimes se reproduisent, mais aussi à réconcilier les divers protagonistes.
Dans son interpellation, Monsieur le Député Sandri pose deux questions :
1. Le Conseil d’Etat a-t-il été retenu par une importante surcharge de travail l’ayant empêché de répondre dans les temps ? Ou est-ce que d’autres raisons que nous souhaiterions connaître sont à l’origine de son retard ?
Les différents changements survenus au niveau de la direction politique du DIRE (suppléance, puis remplacement du Conseiller d’Etat Pierre Chiffelle, démissionnaire pour raisons de santé) ont occasionné une surcharge importante en terme de temps et d’engagement pour le Conseiller d’Etat Jean-Claude Mermoud, qui a eu la charge de la conduite simultanée de deux départements pendant une période relativement longue.
2. En prévision de la journée du 24 avril 2005, le Conseil d’Etat ne pense-t-il pas qu’il devrait donner une réponse digne des attentes suscitées auprès de l’opinion publique de notre région par la prise de position du Grand Conseil vaudois ?
Le Conseil d’Etat renvoie pour ce point aux paragraphes précédents.
Vu ce qui précède, le Conseil d’Etat a l’honneur de proposer au Grand Conseil
− de prendre acte du rapport du Conseil d’Etat au Grand Conseil sur le postulat Massimo Sandri et consorts, demandant au Conseil d’Etat de prendre des mesures propres à reconnaître officiellement le génocide arménien de 1915, et sur l’interpellation Massimo Sandri et consorts, concernant la reconnaissance du génocide arménien.
Ainsi adopté, en séance du Conseil d’Etat, à Lausanne, le 12 janvier 2005.
La présidente : Le chancelier :
A.-C. Lyon V. Grandjean
Declaration of the council of state of the Republic and Canton of Geneva recognizing the Armenian Genocide of 1915.
On June 25, 1998, the Grand Conseil has unanimously adopted a resolution inviting the Conseil d’Etat to recognize with a solemn declaration the genocide perpetrated in 1915 by the Ottoman government against the Armenian people. Recognizing the existence of a genocide is everyone’s duty because such a crime, which does not fall under the statute of limitation, calls on the entire humanity. Denying its existence insults the memory of the victims, trivializes horror and falsifies history. The works of historians are convergent to believe that the Armenians were killed in great number – the varying appreciation of the number of victims resides in the circumstances of this tragedy and does not cast doubt on the existence of the massacre – and that they were killed because they were Armenians. All witnesses of the time, diplomats, soldiers, and civilians have given evidence on the deliberate intention of the Government of Constantinople, and all later documents have confirmed this intention in a way that the facts can not give rise to controversies. Geneva wishes that a lasting peace between Turks and Armenians be established, a peace which can not be built on the occultation of history which heavily weighs on the relations between Turks and Armenians. This present declaration on the recognition of the Armenian genocide of 1915 is therefore not directed against Turkey who, like Germany has done in the case of the Jewish people, can recognize its past crimes in order to build relations with the Armenian people that are founded on historical truth. By recognizing the Armenian genocide of 1915, Geneva places itself, in respect of the international texts on genocide, in the long list of recognition of that crime by numerous countries, by the United Nations and the European parliament.
In the name of the Council of State:
Mrs. Micheline CALMY-REY, President
Mr. Laurent MOUTINOT, Vice-president
Mrs. Martine BRUNSCHWIG GRAF, Member
Mr. Carlo LAMPRECHT, Member
Mr. Robert CRAMER, Member
Mrs. Micheline SPOERRI, Member
Mr. Pierre-François UNGER, Member
Mr. Robert HENSLER, Secretary
DÉCLARATION DU CONSEIL D’ETAT RECONNAISSANT LE GÉNOCIDE ARMÉNIEN DE 1915
Le 25 juin 1998 le Grand Conseil a adopté à l’unanimité une résolution invitant le Conseil d’Etat à reconnaître par une déclaration solennelle le génocide commis en 1915 par le Gouvernement ottoman à l’encontre du peuple arménien. Reconnaître l’existence d’un génocide s’impose à tous car un tel crime, imprescriptible, interpelle l’Humanité dans son ensemble. Nier son existence insulte la mémoire des victimes, banalise l’horreur et falsifie l’Histoire.
Les travaux des historiens sont convergents pour considérer que les Arméniens ont été assassinés en masse – l’appréciation variable du nombre des victimes étant inhérente aux circonstances de ce drame et ne remettant pas en cause l’existence même du massacre – et qu’ils ont été assassinés parce qu’ils étaient Arméniens.
Tous les témoins de l’époque, diplomates, militaires, civils ont attesté de l’intention délibérée du Gouvernement de Constantinople et tous les documents ultérieurs ont confirmé cette intention de sorte que les faits ne peuvent faire l’objet de controverses.Genève souhaite l’établissement d’une paix durable entre Turcs et Arméniens, paix qui ne peut s’établir sur l’occultation de l’Histoire qui hypothèque lourdement les relations entre Turcs et Arméniens.
La présente déclaration de reconnaissance du génocide arménien de 1915 n’est donc nullement dirigée contre la Turquie qui, comme l’Allemagne l’a fait à l’égard du peuple juif, peut reconnaître ses crimes passés afin de construire avec le peuple arménien des relations de paix fondées sur la vérité historique.
En reconnaissant le génocide arménien de 1915, Genève se situe, en respect des textes internationaux sur le génocide, dans la longue lignée de la reconnaissance de ce crime par de nombreux pays, par l’Organisation des Nations Unies et par le Parlement européen.
Au nom du Conseil d’Etat :
Madame Micheline CALMY-REY, Présidente
Monsieur Laurent MOUTINOT, Vice-président
Madame Martine BRUNSCHWIG GRAF, Conseillère d’Etat
Monsieur Carlo LAMPRECHT, Conseiller d’Etat
Monsieur Robert CRAMER, Conseiller d’Etat
Madame Micheline SPOERRI, Conseillère d’Etat
Monsieur Pierre-François UNGER, Conseiller d’Etat
Monsieur Robert HENSLER, Chancelier d’Etat